Bienvenue à Marwen
Robert Zemeckis perpétue sa période conventionnelle avec Bienvenue à Marwen, un film qui aurait pu être le nouveau Forrest Gump mais ayant manqué de magie et de subtilité pour y parvenir.
Note --> 2,5/5
Synopsis : Victime d'amnésie à la suite d'une agression, Mark Hogancamp fuit la réalité pour se réfugier à Marwen, une ville fictive de la Seconde Guerre mondiale qu'il a inventé. Et dans laquelle il anime des poupées reflétant son entourage et ses craintes. Une thérapie personnelle censée le remettre d'aplomb, qui va se retrouver boulverser par l'arrivée du nouvelle voisine...
Si l’on vous évoque le nom de
Robert Zemeckis, vous devriez dans la plupart des cas penser au célèbre
réalisateur qu’il était dans les années 80-90. Au bonhomme ayant commencé avec À
la poursuite du Diamant Vert pour enchaîner avec des cartons planétaires et
intemporels (la trilogie Retour vers le Futur, Qui veut la peau de Roger Rabbit
?, Forrest Gump, Seul au monde, Contact…). Et… c’est tout ! Comment
ça ? Zemeckis aurait-il arrêté le cinéma après cela ? Bien au
contraire, le metteur en scène a poursuivi sa carrière, mais sans parvenir à
marquer les esprits comme il savait si bien le faire. Il a certes expérimenté
le cinéma d’animation en motion capture (Le Pôle Express, La Légende de Beowulf
et Le drôle de Noël de Scrooge) pendant près de 8 ans, avant de revenir à un
style beaucoup plus conventionnel et – pour le coup – moins percutant (Flight,
The Walk, Alliés). Il faut bien voir la vérité en face : Robert Zemeckis
n’est plus le réalisateur qui nous transcendait par le passé. Il est devenu un
faiseur de films ne parvenant plus à capter l’attention du public. Bienvenue à
Marwen, avec son pitch des plus intrigants, avait de quoi redonner de l’intérêt
dans sa filmographie. Voire même faire connaître à cette dernière un nouvel
essor.
En voulant raconter l’histoire
vraie de Mark Hogancamp, Zemeckis a voulu sortir des conventions pour nous
livrer du cinéma pur et dur. Une œuvre qui utilise le pouvoir de l’image pour
pouvoir nous raconter quelque chose. Une histoire, un personnage. Ou comment
traiter la perte de réalité d’un homme qui, après avoir été agressé quasiment à
mort au point de perdre la mémoire, se réfugie dans un univers qu’il a lui-même
créé via des maquettes et des poupées. Plutôt que de passer par la case
« biopic hollywoodien lambda », le papa de Retour vers le Futur a
voulu allier ses années d’expérience et son savoir-faire de ces dernières
années pour nous livrer un film hybride. Un long-métrage qui switche sans mal
entre le tournage live pour exprimer la réalité vécue par le personnage et
l’animation en motion capture pour visualiser son imaginaire. Avec un tel
postulat, Bienvenue à Marwen partait gagnant d’emblée, empochant avec facilité
l’unanimité des critiques. Assurant le retour d’un grand réalisateur qui
s’était un peu perdu au fil des années.
Et autant dire que les premières
minutes du film permettaient de souffler un grand coup. De se dire que le grand
Zemeckis était toujours là, prêt à nous éblouir de par sa technique. En
commençant Bienvenue à Marwen par une séquence « jouée » par notre
héros, le bonhomme impressionne aussitôt : un crash aérien aussi
spectaculaire que dans n’importe quel blockbuster, motion capture crédible, le
jeu assurément exagéré des comédiens, l’humour et – surtout – l’animation des
poupées (l’apparence et la gestuelle)… Zemeckis nous happe sans la moindre
difficulté dans l’esprit de son personnage, nous proposant un univers ludique
bigrement agréable à suivre. Oscillant entre délire un chouïa machiste,
plaidoirie envers le féminisme et drame guerrier tout en piochant dans le vécu
du personnage principal. Ces moments sont les plus réussis du film, aussi bien
du point de vue technique (notons que le film n’a coûté que 39 millions de
dollars) que scénaristique. Avec l’imagination de Mark Hogancamp, Zemeckis
s’est littéralement lâché comme il ne l’avait plus fait depuis belle lurette,
et cela fait véritablement plaisir à voir.
C’est alors que le fantasme se
fige pour laisser place à la réalité. Celle où Hogancamp sort de son esprit
pour redevoir faire face à son traumatisme. La peur de ses agresseurs. Son
asociabilité avec les gens qui l’entourent. Son béguin quasi enfantin pour sa
nouvelle voisine. Bref, diverses petites intrigues qui, mises bout à bout,
pouvaient donner un drame des plus touchants compte tenu de l’imaginaire du
héros. Mais si l’on retiendra l’interprétation très juste de Steve Carell
(délaissant son habit de militaire baroudeur et fantasmé pour celle d’un vieux
garçon fuyant la réalité) et certains plans avec lesquels Zemeckis semblent
s’amuser question échelle (Hogancamp se mouvant au milieu de ses maquettes et
poupées, par exemple), la sauce ne prend malheureusement pas. On retrouve
pourtant la légèreté de Forrest Gump, la musique d’Alan Silvestri et cet esprit
bon enfant et sincère propre au réalisateur… mais rien ne se passe. Si
l’histoire touche, elle ne parvient pas à émouvoir, à toucher en plein cœur. La
faute revenant principalement au fait que la réalité dépeinte dans le film se
trouve être beaucoup trop abstraite : protagonistes aussi caricaturaux que
les poupées, une écriture pas vraiment subtile voire maladroite, des effets de
mise en scène excessifs (le flashback de l’agression, la peur envahissant le
corps de Hogancamp…), des compositions musicales qui en font souvent des
caisses… Personnellement, j’ai bien eu du mal à suivre le retour à la réalité
du héros, que je trouvais pour le coup lent et bien trop conventionnel
(entendre par là hollywoodien) pour intéresser. L’ensemble m’a évidemment
touché et parfois fait rire (Hogancamp fuyant le procès est un régal), mais pas
autant de ce que me promettait initialement le film. Loin de là ! À
trop s’attarder sur cette réalité pompeuse, prenant le pas sur les passages en
animation, Bienvenue à Marwen m’a paru bien long et même assez bancal dans le
traitement de son histoire. Artificiel, même ! Il suffit de voir son
dénouement, parfait exemple de happy end excessivement positif (cette musique,
d’un cliché…), pour admettre que même avec le savoir-faire du réalisateur, la
magie tant espérée n’a pas opéré…
Même avec cette envie de faire du
cinéma, Zemeckis n’est pas parvenu retrouver son aura d’antan. Comme il le fait
depuis déjà quelques années, le réalisateur livre avec Bienvenue à Marwen une
œuvre certes intéressante et touchante, mais ô combien classique et oubliable.
Prouvant que le bonhomme est devenu l’ombre de lui-même, allant jusqu’à
s’autociter (la DeLorean de Retour vers le Futur) pour meubler son œuvre. De la
part d’un cinéaste de son acabit, c’est navrant. Alors oui, le film peut vous
plaire. Un avis reste entièrement subjectif et mérite d’être partagé pour
pouvoir discuter et débattre. D’autant plus que Bienvenue à Marwen n’est pas un
mauvais film. Juste que celui-ci n’a pas réussi à me convaincre alors que son
réalisateur est capable de bien plus marquant que cela.
BANDE-ANNONCE :
FICHE TECHNIQUE :
Titre original : Welcome to Marwen
Réalisateur : Robert Zemeckis
Scénario : Robert Zemeckis et Caroline Thompson
Casting : Steve Carell (Mark Hogancamp/Capitaine Hogie), Leslie Mann (Nicol), Diane Krueger (Deja Thoris), Falk Hentschel (Louis/Capitaine Topf), Merritt Wever (Roberta), Eiza González (Carlala), Janelle Monáe (GI Julie), Gwendoline Christie (Anna)...
Photographie : C. Kim Miles
Décors : Stefan Dechant
Costumes : Joanna Johnston
Montage : Jeremiah O'Driscoll
Musique : Alan Silvestri
Producteurs : Robert Zemeckis, Jack Rapke, Steve Starkey et Cheryanne Martin
Productions : Universal Pictures, DreamWorks et ImageMovers
Distribution : Universal Pictures International
Genre : Drame biographique
Durée : 1h54
Budget : 39 M$
Date de sortie : 02 janvier 2019
Costumes : Joanna Johnston
Montage : Jeremiah O'Driscoll
Musique : Alan Silvestri
Producteurs : Robert Zemeckis, Jack Rapke, Steve Starkey et Cheryanne Martin
Productions : Universal Pictures, DreamWorks et ImageMovers
Distribution : Universal Pictures International
Genre : Drame biographique
Durée : 1h54
Budget : 39 M$
Date de sortie : 02 janvier 2019
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