RATTRAPAGE 2018 --> Astérix : le Secret de la Potion Magique
Le Domaine des Dieux aurait pu être un coup de chance. Alexandre Astier et Louis Clichy confirment avec Le Secret de la Potion Magique qu'ils ont bel et bien découvert la recette pour faire une excellente adaptation d'Astérix.
Note --> 4/5
Synopsis : À la suite d’une chute lors de la cueillette du gui, le druide Panoramix
décide qu’il est temps d’assurer l’avenir du village .Accompagné
d’Astérix et Obélix, il entreprend de parcourir le monde gaulois à la
recherche d’un jeune druide talentueux à qui transmettre le secret de la potion magique. Et ceux sans que le sournois Sulfurix, rival de Panoramix, ne s'en empare…
En 2014 après Jésus Christ, plus personne ne parvenait à faire
une adaptation d’Astérix digne de ce nom. Plus personne ? Non ! Quelque
part en France, deux irréductibles du cinéma français ont réussi
l’exploit de nous livrer un long-métrage qui sache retranscrire à
merveille le charme de la bande dessinée, l’efficacité hors pair de
l’humour de René Goscinny. Entre les films certes drôles mais n’ayant rien d’un Astérix (Mission Cléopâtre) ou tout simplement loupé (les autres), en passant par un dessin animé lambda surfant sur un esprit jeuns et moderne inadapté (Astérix et les Vikings),
notre célèbre petit Gaulois avait de quoi se trouver bafoué par ces
diverses exploitations commerciales qui lui faisaient défaut. C’est
alors qu’arriva Alexandre Astier et Louis Clichy qui, avec Le Domaine des Dieux,
étaient parvenus à livrer une adaptation qui fasse honneur à l’œuvre
originelle (aussi bien du point de vue visuel que de l’écriture) tout en
l’amenant vers de nouveaux horizons sans en dénigrer l’essence même
(les références à la pop culture, l’actualité mise en avant, la plupart
des gags, l’apport de certaines séquences vis-à-vis de la BD)… Il n’y
avait rien à dire, le duo avait su nous offrir l’une des meilleures
adaptations d’Astérix, juste derrière l’inégalable Les Douze Travaux.
Un exploit, je vous dis ! Et pour notre plus grand bonheur, le tandem
se reforme pour une nouvelle aventure, qui prouve que les deux bonhommes
connaissent cette fameuse recette. Qu’ils sont littéralement tombés
dedans quand ils étaient petits.
Car cette fois, il n’est plus question d’adaptation. Fini les films reprenant un album tout entier (Astérix le Gaulois, Astérix et Cléopâtre, Astérix chez les Bretons, Astérix et les Indiens, Astérix et les Vikings, Le Domaine des Dieux, Mission Cléopâtre, Astérix aux Jeux Olympiques), se présentant comme un mix de plusieurs (La Surprise de César, Le Coup du Menhir, Au service de Sa Majesté) ou bien piquant à droite à gauche pour pouvoir exister scénaristiquement parlant (Astérix et Obélix contre César).
Ici, Astier et Clichy osent suivre les traces des créateurs même du
personnage en s’attaquant cette fois-ci à une histoire originale (Les Douze Travaux).
Alors que beaucoup se cassent les dents en recopiant certains opus,
notre duo a le culot de créer sa propre intrigue. Un défi de taille,
véritablement casse-gueule, remporté haut la main ! À partir d’une
histoire véritablement simple – Panoramix cherchant son successeur pour
faire la potion magique –, Astier/Clichy nous resservent un savant
mélange entre humour propre à la BD (les chamailleries entre
Cétautomatix et Ordralfabétix, le côté artiste d’Assurancetourix, les
maladresses d’Abraracourcix, l’armée romaine ridiculisée, les jeux de
mots, les références à l’actualité…) et trouvailles gaguesques qui font
leur petit effet (la recherche du successeur façon Nouvelle Star,
le conseil des vieux druides digne des Grosses Têtes, le final à la
Godzilla..). Le tout en se permettant, encore une fois, des références à
la pop culture jamais gratuites (l’utilisation de la musique de Kaamelot, hilarante !) et même à l’œuvre d’Astérix dans son ensemble (Aplusbégalix issu du Combat des Chefs et son passé avec nos héros, des images d’Astérix et Cléopâtre et des Douze Travaux…).
Et tout cela pour quoi ? Eh bien pour faire avancer nos personnages et
leur univers (alors que d’autres adaptations se contentent du minimum
syndical). Ici, nous avons en la personne de Sulfurix un antagoniste
d’envergure, qui peut aisément se ranger aux côtés d’Amonbofis, Détritus
et Prolix. Ici, le film est le premier a donné une histoire digne de ce
nom à Panoramix et à le creuser comme il se doit en termes d’écriture.
En lui donnant un passé, une raison d’être, un questionnement. Bref, un
travail d’adaptation de mains de maître montrant que les deux hommes
connaissent la bande-dessinée sur le bout des doigts, qui ne pèche que
par cette tendance à vouloir mettre Astérix et Obélix au second plan de
l’intrigue (Astérix est éjecté pendant un tiers du film, c’est pour dire
!
Le Secret de la Potion Magique n’est
pas en reste non plus du point de vue technique, Louis Clichy usant de
son savoir-faire acquis pendant ses années Pixar (rappelons qu’il était
animateur sur WALL-E et Là-haut) pour livrer une aventure incroyablement rythmée et visuellement drôle. Reprenant la formule de l’animation 3D du Domaine des Dieux
et la poussant encore plus loin dans le détail (les cheveux, les
décors, les vêtements…), ce qui donne un film haut en couleurs, fluide
et surtout agréable à regarder. Confirmant au passage ce qui se disait
déjà sur le long-métrage précédent : que la 3D ne dénature en rien les
travaux d’Albert Uderzo, donnant du relief aux
personnages et ne trahissant jamais leurs traits si spécifiques,
mémorables. Cette dernière alliée au sens du montage (qui permet ce
rythme endiablé) et les compositions musicales de Philippe Rombi, qui peut désormais prétendre être le digne successeur de Gérard Calvi (Astérix le Gaulois, Astérix et Cléopâtre, Les Douze Travaux) et de Vladimir Cosma (La Surprise de César, Astérix chez les Bretons), nous obtenons là un film Astérix qui écrase sans mal les adaptations live et ses prédécesseurs… sauf encore une fois Les Douze Travaux, qui reste à mes yeux le dessin animé ultime du petit Gaulois !
Là où, personnellement, j’avais le plus peur, c’était du côté du doublage. À cause de cette surenchère de célébrités (Alex Lutz, Alexandre Astier lui-même, Elie Semoun, Florence Foresti…) et de « potes » à Astier (Guillaume Briat, Serge Papagali, François Morel, Lionnel Astier, Franck Pitiot…) ? Le Domaine des Dieux
et son doublage « à l’Américaine » (voix enregistrées avant
l’animation) avait su trouver son efficacité, faisant oublier les stars
derrière les personnages et donnant même des résultats plus que
convaincants (Foresti en Bonnemine, exceptionnelle !). Seule ombre au
tableau : Briat en Obélix, sa voix n’étant pas la plus adaptée pour le
personnage. Pour Le Secret de la Potion Magique,
rien n’a changé ! À cause du casting cinq étoiles, délaissant les vrais
doubleurs ? Du tout, et j’en remercie d’ailleurs Astier d’avoir mis en
avant certains professionnels de ce milieu (Bernard Alane, Gérard Hernandez…)
jusque dans la promotion du film. Il est même allé chercher des noms
issus du monde théâtral, offrant de la prestance à certains personnages (Daniel Mesguich
en Sulfurix, un régal !). Non, ce que je craignais, c’était le
remplacement de Roger Carel dans le rôle d’Astérix. Lui, qui a toujours
été et restera à jamais la voix du petit Gaulois, laisse pour la
première fois sa place (car étant à la retraite et – il faut bien le
dire – beaucoup trop âgé pour continuer)… à Christian Clavier
! Juste parce que ce nom de la comédie française a déjà interprété le
personnage dans les deux premiers films live et qu’il est apparu dans Kaamelot
? Peu importe la raison, la crainte étant là tout de même ! Et bien je
peux me retrouver rassuré après ce film, car Clavier, bien loin de la
cultissime interprétation de Carel, a su prendre le relai. L’acteur est
parvenu à retranscrire l’énergie, la sagesse et le côté grincheux du
héros sans jamais en faire trop (tout le contraire de ce qu’il avait
fait dans Astérix et Obélix contre César). Sa voix passe plutôt bien, et c’est un bon point !
Vous l’aurez remarqué : cette critique parle avant toute chose de
succession. Que ce soit par le biais de l’intrigue principale avec
Panoramix ou bien des gens qui ont travaillé sur ce film d’animation
(Christian Clavier, Philippe Rombi…). Cela coule de source ! Avec toutes
les adaptations jusque-là sorties, tout produit dérivé confondu, René
Goscinny et Albert Uderzo ont trouvé en Alexandre Astier et Louis Clichy
leurs successeurs. Ceux qui ont compris ce qu’ils avaient entre les
mains et ont su l’exploiter comme il le fallait, sans le dénaturer ni
lui faire défaut. Ils l’avaient déjà prouver avec Le Domaine des Dieux, ils le confirment de nouveau avec Le Secret de la Potion Magique.
Et autant dire que le secret de cette recette est désormais bien
gardée. En espérant que le duo veuille bien nous en resservir une
tournée avant que quelqu’un d’autre ne prenne le relai et ne bafoue une
fois de plus l’œuvre de Goscinny et d’Uderzo (un nouveau film live est
annoncé pour 2020…).
BANDE-ANNONCE :
FICHE TECHNIQUE :
Titre original : Astérix : le Secret de la Potion Magique
Réalisateur : Alexandre Astier et Louis Clichy
Scénario : Alexandre Astier, d'après les personnages créés par René Goscinny et Albert Uderzo
Casting : Christian Clavier (Astérix), Guillaume Briat (Obélix), Bernard Alane (Panoramix), Daniel Mesguich (Sulfurix), Lévanah Solomon (Pectine), Alex Lutz (Téléférix), Alexandre Astier (Oursenplus, Huiledolix), Élie Semoun (Cubitus)...
Animation : Alexandre de BrocaMontage : Bertrand Maillard
Musique : Philippe Rombi
Producteurs : Nicolas Trout et Natalie Altmann
Productions : M6 Studio, M6 Films, Les éditions Albert René, Mikros Image, Canal+, OCS, M6, W9, Région Ile-de-France et CNC
Distribution : SND
Genre : Animation
Durée : 1h25
Budget : ???
Date de sortie : 05 décembre 2018
Commentaires
Enregistrer un commentaire