RATTRAPAGE 2018 --> Millénium : Ce qui ne me tue pas
Désireux d'exploiter la saga Millénium par tous les moyens possibles, Sony fait main basse sur le pourtant excellent film de David Fincher pour livrer ce produit dispensable et incroyablement tape-à-l'oeil.
Note --> 2/5
Synopsis : Frans Balder, éminent chercheur suédois en intelligence artificielle fait appel à Lisbeth Salander afin de récupérer un logiciel qu'il a créé et permettant de prendre le contrôle d'armes nucléaires. Mais la NSA ainsi qu'un groupe de terroristes mené par Jan Holster sont également sur la piste du logiciel. Traquée, Lisbeth va faire appel à son ami le journaliste Mikael Blomkvist qu'elle n'a pas vu depuis 3 ans...
David Fincher à la réalisation de Millénium, avec en têtes d’affiche Rooney Mara et Daniel Craig. Une nouvelle adaptation tout aussi soignée que la suédoise avec Noomi Rapace et Michael Nyqvist. Cela ne pouvait qu’être un succès, non ? Eh bien, pas tant que cela… Si le film est, à titre personnel, tout bonnement excellent, celui-ci n’a pas su convaincre les producteurs de par son score au box-office, jugé décevant (près de 233 millions de dollars à travers le monde, pour un budget de 90 millions). Ajoutez à cela un Daniel Craig devenu beaucoup trop gourmand en matière de cachet depuis qu'il incarne James Bond et des tensions entre les producteurs et David Fincher, et vous comprendrez très vite pourquoi Millénium 2 made in USA ne s’est jamais fait. Et ce malgré des rumeurs qui disaient le contraire pendant quelques années. Non, le projet était bel et bien mort… jusqu’à ce que Sony surprenne tout le monde en annonçant un tout nouveau film. Non pas une suite mais une adaptation inédite. Celle du quatrième volet, jamais effectuée jusque-là. L’occasion pour le studio de rebooter la franchise en nommant un nouveau réalisateur ainsi qu’un nouveau casting. Et en la personne de Fede Alvarez (Evil Dead, Don’t Breathe), autant dire que ce « Millénium 4 » avait une chance de séduire l’assistance. Vraiment !
Que l’on soit fan ou non de son travail, le cinéaste a su démontrer
dans ses longs-métrages sa faculté à créer une atmosphère tendue. Une
ambiance qui oscille avec facilité entre le glauque, le malsain et le
glacial. Bref, ce qu’il fallait pour un film Millénium, afin de
retranscrire les décors peu avenants de cette Suède dépeinte dans les
livres. Alvarez, à défaut d’être aussi talentueux que Fincher, était la
personne idéale pour reprendre les enquêtes de Lisbeth Salander et
Mikael Blomkvist. Malheureusement, nous sommes très loin du compte et ce
dès les premières minutes. Est-ce un désir des producteurs qui ont
transformé le réalisateur en yes man ou bien un excès de confiance de ce
dernier ? Il n’empêche que Millénium 4
affiche une mise en scène tape-à-l’œil au possible. Tout semble avoir
été pensé pour créer une atmosphère étrange dans ce film. Que ce soit la
direction artistique, oscillant entre des jeux de couleurs flagrants
(une robe rouge pétant dans un paysage neigeux, les lumières d’ambiance
d’une boite de nuit…). Les effets excessifs de Fede Alvarez et de sa
monteuse Tatiana S. Riegel (ralentis, caméra volant dans les décors…). Ou encore les compositions musicales de Roque Baños,
se vautrant parfois dans les poncifs à outrance (comme sortir les
violons pour un moment triste). Tout a été mis en œuvre pour conférer à Ce qui ne me tue pas
une atmosphère qui se fasse remarquer. Mais celle-ci n’est ni malsaine,
ni tendue. Certes stylisée mais surfaite, voire artificielle au
possible. Tellement étrange qu’elle nous sort littéralement de
l’intrigue, nous empêchant d’y être attentif. Et pour un thriller, c’est
plutôt rageant !
Mais la mise en scène et l’allure général du film ne sont pas les
seuls défauts à déplorer. Il faut également en vouloir au scénario. Et
pour cause, ce dernier n’effectue que le minimum syndical, à savoir
reprendre les grandes lignes du livre – et encore, n’ayant pas lu ce
dernier, j’ai pu découvrir que ce film s’éloignait beaucoup de son
modèle littéraire – sans pour autant étoffer tout le reste. Dans le
cadre d’une adaptation, c’est plutôt courant (pour ne pas dire
désolant). Si ce constat s’avère navrant, on peut tout de même faire fi
du manque de travail d’écriture. Mais dans le cadre de ce Millénium 4,
ce n’était tout bonnement pas permis. Car rappelons que ce film s’est
vendu à nous comme un reboot de la saga. Qu’il se devait donc de
repartir de zéro. De devoir nous présenter à nouveau les personnages,
leur passé respectif et les relations qui les unis. D’autant plus que
c’était la chose la plus judicieuse à faire, le statut reboot induisant
le fait que le film pouvait s’ouvrir à de nouveaux spectateurs néophytes
de la saga créée par Stieg Larsson. Qui ne
connaissent nullement les protagonistes et leur histoire. Qui n’ont
peut-être pas eu la chance de voir les versions suédoises du 2 et du 3 dans lesquelles les personnages ont pu évoler (et qui n’ont pu être faits aux USA). Mais non, Millénium 4
a préféré aller directement dans le vif du sujet, comme si tout le
monde suivait la saga depuis le début et serait capable de comprendre
les nuances de l’histoire sans pour le coup les évoquer (la relation
entre Lisbeth et Mikael, le passé douloureux de Lisbeth, les affaires de
son père...). Difficile donc de s’intéresser à une intrigue faussement
tortueuse qui ne prend jamais le temps de s’attarder sur ses
personnages. Déjà que l’ambiance tape-à-l’œil n’aidait pas beaucoup…
Pour le reste du film, disons que c’est potable. Les séquences
d’action sont rondement menées à défaut d’être exceptionnelles. Les
comédiens sont dirigés comme il faut sans pour autant être aussi
charismatiques et inoubliables que leurs prédécesseurs – bien que Claire Foy
nous livre une Lisbeth convaincante. Une intrigue titillant tout de
même notre curiosité au point de nous donner envie de nous attaquer à la
lecture du bouquin. Millénium : Ce qui ne me tue pas
n’est vraiment pas un mauvais film. Il y en a de biens pires, surtout
en cette année 2018. Ce sont malheureusement les décisions prises lors
de sa conception qui en font un titre de très faible envergure, lui
donnant bien plus des airs de téléfilm du dimanche soir plutôt que de
long-métrage méritant sa place sur grand écran.
Résultat des courses : un échec des plus cuisants pour le retour de la saga Millénium.
À peine plus de 31 millions de dollars récoltés à travers le monde et
ce pour un budget de 43 millions (hors frais de promotion). Des
critiques dans l’ensemble peu emballées. Des spectateurs même pas
convaincus pour un sou. Sony voulait absolument exploiter la saga
suédoise tout en réduisant les coûts à l’excès pour éviter « l’échec
commercial » du film de David Fincher. Le studio se retrouve
ironiquement avec une véritable hécatombe financière sur les bras. Cela
en valait-il la peine d’écarter un mec aussi talentueux que le
réalisateur de Se7en et d’éviter de trop dépenser dans le cachet
de Daniel Craig pour faire une adaptation américaine de haute tenue ?
Les producteurs devaient le penser. Désormais, ils doivent s’en mordre
les doigts, ayant tout simplement détruit toute chance à la saga de
perdurer au cinéma…
BANDE-ANNONCE :
FICHE TECHNIQUE :
Costumes : Ellen Mirojnick et Carlos Rosario
Montage : Tatiana S. Riegel
Musique : Roque Baños
Producteurs : Scott Rudin, Eli Bush, Elizabeth Cantillon, Berna Levin, Amy Pascal, Søren Stærmose et Ole Søndberg
Productions : Sony Pictures Entertainment, Metro-Goldwyn-Mayer, New Regency Pictures, Scott Rudin Productions, Yellow Bird, Pascal Pictures et The Cantillon Company
Distribution : Sony Pictures Realeasing
Genre : Thriller
Durée : 1h57
Budget : 43 M$
Date de sortie : 14 novembre 2018
FICHE TECHNIQUE :
Titre original : The Girl in the Spider's Web
Réalisateur : Fede Alvarez
Scénario : Fede Alvarez, Steven Knight et Jay Basu, d'après les livres de Stieg Larsson et David Lagercrantz
Casting : Claire Foy (Lisbeth Salander), Sverrir Gudnason (Mikael Blomkvist), Lakeith Stanfield (Ed Needham), Sylvia Hoeks (Camilla Salander), Stephen Merchant (Frans Balder), Christopher Convery (August Balder), Claes Bang (Jan Holster), Synnøve Macody Lund
(Gabriella Grane)..
Photographie : Pedro Luque
Décors : Eve StewartCostumes : Ellen Mirojnick et Carlos Rosario
Montage : Tatiana S. Riegel
Musique : Roque Baños
Producteurs : Scott Rudin, Eli Bush, Elizabeth Cantillon, Berna Levin, Amy Pascal, Søren Stærmose et Ole Søndberg
Productions : Sony Pictures Entertainment, Metro-Goldwyn-Mayer, New Regency Pictures, Scott Rudin Productions, Yellow Bird, Pascal Pictures et The Cantillon Company
Distribution : Sony Pictures Realeasing
Genre : Thriller
Durée : 1h57
Budget : 43 M$
Date de sortie : 14 novembre 2018
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